20 décembre 2021
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Gan à travers le temps : Un épisode de choléra à Gan à l'automne 1855

Daniel Trallero nous raconte ici des épisodes marquants de la vie gantoise.

Pendant un mois, il ne se passait pas une journée sans que l’on n’enterre 4 ou 5 personnes, le pic étant atteint dans la journée du 2 octobre avec 9 décès. A cette époque on ne savait rien de la maladie et on ne pouvait qu’implorer les cieux.

Avant le choléra : la peste 

Il ne faut pas confondre peste et choléra. Ces deux maladies issues toutes les deux des confins de l’Asie font leur apparition à des époques bien distinctes. 

La peste arrive à Marseille, en 1348. C’est la Grande Peste ou Peste noire. Cette maladie met fin à une période de forte croissance démographique. En plusieurs vagues successives, la France perd plus d’un tiers de sa population, voire 50% dans certaines villes. Elle ne la retrouvera qu’au milieu du 16ème siècle. D’autres épisodes de peste surgiront, mais la maladie disparaitra au milieu du 18ème. 

Le bacille de la peste a été véhiculé par les rats, le long des routes commerciales qui animent les échanges de la fin Moyen-âge ; c’est par leurs puces qu’il se propage à l’homme. La peste se manifeste sous deux formes : bubonique (bouton s’infectant après la piqûre d’une puce) ou pulmonaire (par inhalation du bacille et dans ce cas à 100% mortelle).

Le choléra

Au cours du 19ème, alors que la population s’habituait depuis près d’un siècle à vivre sans épidémie, le choléra fait son apparition en France. La 1ère vague en 1832-1834 frappe essentiellement Paris et le nord de la France (120 000 décès en 1832). C’est une 3ème vague, venue après 1848 (102 000 décès en 1849), qui gagne tardivement le Pays-basque et le Béarn. Elle démarre en août à Bayonne avant d’atteindre les arrondissements d’Orthez et d’Oloron et enfin celui de Pau. Gan sera frappée en septembre 1855 à l’instar d’autres villes comme Nay, Bruges, Jurançon, Rébénacq et Tardets. 

Le bacille du choléra, ou vibrion cholérique, se développe dans les eaux stagnantes. D’abord découvert par Filippo PACINI en 1854, mais rapidement oublié, il ne sera redécouvert qu’en 1883 par Robert KOCH, lors d’une expédition en Egypte. La maladie se présente sous la forme d’une dysenterie ; les malades décèdent de déshydratation au bout de quelques jours. Bizarrement le choléra disparaît tout aussi rapidement qu’il est apparu.

A Gan, il surgit le 18 septembre et disparaît le 12 octobre. On constate 74 décès en septembre et 46 en octobre, alors qu’auparavant la moyenne des décès ne dépassait pas 5 par mois. Toutes les tranches d’âge sont touchées (27 cas avant 5 ans, 15 cas de 6 à 25 ans, 42 cas de 26 à 60 ans et 36 cas au-delà), atteignant autant les hommes que les femmes (59 hommes et 61 femmes). 

Alors qu’à Nay, les délibérations du Conseil municipal regorgent d’informations sur cette épidémie (*) et que l’on remercie tous ceux qui ont apporté leur aide pour la combattre, rien de cela à Gan. On note une simple allusion lors du conseil du 7 novembre, où se pose la question d’avoir un nouveau cimetière "hors de la ville" au cas où une nouvelle épidémie surviendrait. C’est l’acte de naissance du cimetière actuel ; l’ancien devenu trop petit se situait sur l’île du Néez à l’emplacement de la salle Jean-Pierre Léris.

Le choléra sévira aussi en Aragon et de nombreux Espagnols viendront se réfugier à Pau. Curieusement Pau fut épargnée par l’épidémie et une publicité fut faite dans le Times de Londres pour que les touristes anglais ne soient pas affolés et continuent à affluer à Pau dont la salubrité était devenue légendaire. Le 9 décembre un Te Deum d’actions de grâce est célébré en Béarn pour marquer la fin définitive de l’épidémie.

Daniel Trallero 

Association GAN – Mémoire 

Mai 2012

(*) Nay dont la population atteignait 4000 habitants a eu 50 décès en septembre et 163 en octobre.

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